Je suis un intello précaire – Chronique du 21 juin 2018
Les expats sont-ils génétiquement supérieurs ?
Salut les précaires !
Aujourd’hui, je vais vous pomponner, vous redonner ce sentiment d’appartenance qui nous fait si cruellement défaut. Cette chronique est plus spécialement destinée aux précaires qui vivent à l’étranger et qui auraient des problèmes à se trouver une identité professionnelle. Rappelez-vous, je suis sur Londres (pas pour fuir l’impôt, je le répète ; mais plutôt comme refugié culturel. Ceci fera l’objet d’une autre chronique). Et ici, j’ai souvent eu l’occasion de côtoyer des « expats ».
Définition : un « expat », abréviation d’expatrié, est communément définit comme un travailleur spécialisé, un artiste, indépendant ou envoyé à l’étranger par un employeur (entreprise, université, lycées, gouvernement, etc.). Mais dans une plus large mesure, le terme englobe tous ceux qui vont s’installer ailleurs. Je suis l’un d’entre eux.
Les précaires peuvent se considérer « expats » mais il ne faut pas pousser ; les vrais de vrais sont ceux qui travaillent pour le gouvernement ou des multinationales françaises, ceux qui touchent un salaire plus élevé parce qu’ils sont à l’étranger et qui ont des vacances payées, parfois des logements de fonctions, et un niveau de vie enviable. On les voit beaucoup dans et autour des lycées français, des instituts français, des consulats, des chambres de commerce et j’en passe.
Le précaire éprouve des sentiments flous envers les expats car c’est un pauvre. Et s’il fait parfois mine de joindre leurs cercles, lors d’élections présidentielles ou de match de foot de la sélection française, il y est accepté avec retenue.
Le précaire peut vexer, voire insulter un expat, si, au cours d’une conversation, il le compare à un travailleur immigré. L’expat, quand il est blanc, n’est pas un immigré. Il existe une hiérarchie dans l’univers de l’immigration et il se chargera de vous le rappeler. Dans cette hiérarchie, les Africains sont des immigrés, les Asiatiques sont des immigrés, les Sud-Américains sont des immigrés, mais les Européens sont des expats. Ils se situent en haut, tout en haut de la pyramide. Pour lui, « l’immigré » est un terme destiné aux « races inferieures ».
En suivant à la lettre ces critères, vous pouvez même, sur les trottoirs de la City de Londres, ou dans les beaux quartiers de South Kensington vous amuser à séparer les expats des migrants. Faites-vous accompagner d’un vrai expat qui saura vous conseiller dans vos premiers pas et après quelques heures seulement, vous ferez presqu’un sans-faute. En quelques semaines, vous aurez l’autorité en la matière d’un suprémaciste déboutonné.
Alors, expat ou immigrés ? Ami(e) précaire, tu peux maintenant mieux choisir ton camp.
A demain